gardez le sourire

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2.        Écrire un titre ou une phrase par paragraphe

3.        Mise en commun et explication du vocabulaire, des expressions.

Un conte de tradition thaïlandaise, Henri Gougaud, L'arbre aux trésors, coll. Légendes du monde entier, Seuil, Paris 1981, pp. 183-185.

                                                            La partie d’échecs

Un guerrier au front soucieux, fatigué d'errer de festins en défaites et de longues marches en victoires illusoires, s'en fut un jour rendre visi­te à un ermite fort réputé pour sa bonté sim­ple et sa sagesse imperturbable.

Dans la hutte de branches où il fut reçu, ce guerrier conta au saint homme ses rudes aventures et lui confia qu'il était las des méchancetés terrestres. Puis:

- Je ne veux plus que vous pour maître, lui dit-il. Enseignez-moi ce savoir qui illumine votre visage et qui rend belle la vie.

L'ermite lui conseilla de méditer, de creuser l'écorce des apparences, de s'efforcer de dé­couvrir, dans la mauvaise gangue du monde, te fruit savoureux de la paix. Il lui apprit com­ment maîtriser son souffle et conduire ses pensées. Le guerrier promit à son maître d'ob­server ses commandements et s'en retourna chez lui,

Une année passa, limpide pour l'un, amère pour l'autre. Celui qui avait décidé d'atteindre la sagesse s'engagea bravement sur le chemin tracé, mais se perdit dans les labyrinthes de son âme. Un matin d'été, à bout de peine, il revint se plaindre auprès du saint homme.

-          Malgré mes efforts, lui dit-il, je n'ai fait aucun progrès. Je suis toujours aussi avide, toujours aussi mal vivant, toujours incapable d'amour.

Comment pourrais-je aimer ta vie qui m'envi­ronne? Comment pourrais-je aimer tes autres? j e ne m'aime pas moi-même!

L'ermite, patiemment, lui donna de nouvelles leçons. Il s'échina encore une pleine année, mais n'y parvint pas. It s'en revint une nouvelle fois voir t'ermite dans sa forêt et lui reprocha son incompétence.

- Vous n'avez pas su m'apprendre à aimer, lui dit-it. je crains foi-t, pauvre homme, que vous ne soyez un imposteur.

L'autre ne s'offusqua point, au contraire. Il écouta ses jérémiades avec une attention presque enfantine puis s'en fut prendre, dans un coin obscur de sa hutte, un jeu d'échecs. Après quoi, il Lui dit en souriant:

- Jouons ensemble une partie, mais .qu'elle soit définitive et sans pitié. Celui qui ta perdra devra mourir. Le vainqueur lui tranchera ta tête. Es-tu d'accord pour cet enjeu? Le guerrier, étonné, regarda son maître, puis voyant briller dans ses yeux une lumière de défi:

- D'accord, dit-il.

Le guerrier se trouva bientôt en mauvaise posture. Après 6 coups joués, il avait déjà perdu trois pièces importantes. Il prit peur. Bouleversé par la main froide de ta moi-t, il joua de plus en plus mat. Après 12 coups, il était au bord de ta débâcle. Il regarda son adversaire et te vit impassible. Il se souvint que, d'ordinaire, il était de bonne force aux échecs, et lui vint l'évidence que seul le spectre de la mort t'empêchait de donner toute sa mesure.

"je dois d'abord me débarrasser de mon épou­vante, Si je veux avoir une chance de survivre", se dit-il, "je dois m'en débarrasser à t'instant même! Voilà t'important."

Il vit comment sauver son roi, en grand danger d'être pris. Il reprit espoir, oublia son effroi. Après 24 coups, il découvrit une faute dans te jeu de son adversaire. Il se dit alors:

"Pourquoi tuerais-je ce brave homme? En vérité, le suis sûr qu'il aurait pu facilement gagner ta partie quand ta peur me tenaillait. Il ne t'a pas fait. Quelle sorte de fauve serais-je si j'abattais mon sabre sur son cou?" Alors t'ermite renversa t'échiquier dans t'herbe, d'un geste négligent.

- Il faut vaincre d'abord ta peur. Ensuite peut venir t'amour, dit-it. As-tu compris?

Le guerrier, enfin délivré, éclata de rire. Il savait maintenant comment goûter pleinement ta vie.