gardez le sourire

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Conte: Le vingt-neuvième jour

Introduction

Ce texte est tiré d'un livre d'aventures dont le titre est: "SURVIVRE".

Il raconte l'histoire authentique d'une famille de naufragés qui ont vécu 38 jours sur un canot pneumatique, en plein océan Pacifique. Avec seulement trois journées de vivres et de boisson, sans carte et sans compas, Dougal Robertson (l'auteur), sa femme Lyn, leur fils aîné Douglas (18 ans), leurs jumeaux Neil et Sandy (12 ans) et un étudiant (Robin), ont survécu à l'enfer de l'océan.

 

Le vingt-neuvième jour

Durant la nuit, grâce à une légère brise, l'Endamair, traînant son ancre flottante, progressa régulièrement en direction de l'Est à un bon noeud de moyenne. Le lever du soleil nous permit de vérifier notre cap et les tâches vitales reprirent leur droit selon une routine bien établie. Je venais de me remettre au travail pour fabriquer mon gaffeau lorsque mon regard discerne dans l'eau, juste au-delà des éclairs bleus, verts et or que jetaient les dorades, la tache marron d'un requin. Depuis ma brève étreinte avec un représentant de cette espèce, je n'avais pas vu de squale aussi petit. Je devais pouvoir capturer celui-ci. Saisissant le poisson volant qui s'était abattu dans le canot au cours de la nuit, je l'accrochai à ma ligne et, après l'avoir lourdement lestée, je la balançai assez loin pour éviter les poissons nécrophages. L'hameçon coula à proximité du squale et je crus d'abord que l'animal allait ignorer l'appât; mais lorsque celui-ci s'immobilisa, le requin se retourna et vint le renifler. Allongé en travers, au fond du dinghy, à la place que j'occupais d'habitude près du banc central, Douglas se redressa.

-   Qu'est-ce que tu fais papa ? demanda-t-il.

-   Je pêche un requin, répliquai-je calmement en surveillant le squale qui s'approchait davantage de l'appât.

-   Tu es complètement fou ! jeta Douglas, visiblement inquiet. Robin s'était également redressé.

-   Il ne faut pas ... commença Lyn.

-   Sacré papa ! s'écria Neil, et Sandy renchérit.

-   Je crois que je le tiens, précisai-je en surveillant ...attentivement son avance prudente.  [...]

Il me fallait ferrer à l'instant précis où il chercherait à attraper le poisson volant car, s'il refermait sa mâchoire sur le fil de nylon, il le sectionnerait immanquablement. Je voulais planter mon hameçon dans son palais. Mes doigts m'apprirent que le requin venait de mordre et je tirai à moi rapidement. La ligne se mit à bondir. Il était ferré !

Tantôt acceptant son sort avec nonchalance et tantôt se tordant sur lui-même et plongeant frénétiquement pour se libérer, le requin me combattit. J'avais peur de voir la ligne se briser mais je craignais davantage encore qu'un de ses congénères plus gros ne surgisse pour attaquer celui que j'avais ferré. Le nylon entaillait profondément la paume de ma main mais, petit à petit, j'obligeai la bête à remonter vers la surface. La pagaie en main, Lyn attendait, assise à l'arrière du canot. Le squale creva la surface, se débattit sauvagement et plongea à grande profondeur. Il avait bien 5 pieds de long et je dus filer un bon bout de ligne.

-   Un requin-mako, observa Douglas, qui était notre expert en matière de squales.

Je l'avais ferré à l'oeil et soudain il remonta.

-   Cette fois nous l'aurons ! grommelai-je. Mes mains me faisaient mal et j'ajoutai à l'adresse de Robin: < Tiens-toi prêt à prendre ma ligne ... je l'attraperai par la queue et le hisserai à bord.>

Nous étions tous surexcités, sauf peut-être Robin et Lyn, un peu inquiets de se voir confier la tâche de veiller sur le squale du côté de la tête, mais ils n'en étaient pas moins résolus à faire de leur mieux. Je savais que le requin se libérerait si je tentais de le hisser à bord à l'aide de ma ligne. Avec précautions, Robin me prit le nylon des mains parce que notre gros gibier revenait en surface. Je me penchai rapidement et le saisis par la queue.

-   équilibrez ! hurlai-je ! ... et Douglas se porta de l'autre côté du dinghy. La peau était rugueuse et j'avais une bonne prise. Une traction me suffit pour amener l'animal en travers du plat-bord. < Soulevez-lui la tête, hissez-la ! >

Robin obéit tandis que je maintenais le requin par la queue. Lyn enfonça la pagaie dans la gueule et les mâchoires claquèrent sur le bois. D'un coup de couteau, je lui crevai l'autre oeil. Il se débattit puis ne remua plus. Douglas prit ma place, saisit la queue. Très vite, j'enfonçai mon couteau dans la fente d'une ouïe et sciai jusqu'au moment où je réussis à détacher la tête.

-   Tu peux le lâcher maintenant, dis-je à Douglas. Je me sentais fier; nous avions défait un de nos plus terribles ennemis ... Les requins ne dévoreraient pas les Robertson, mais les Robertson, eux, mangeraient du requin ! Rapidement, je détachai le coeur et le foie puis récoltai 35 à 40 livres de chair. A l'exception de la tête, nous n'avions pas grand-chose à jeter à la mer. Le foie et le coeur furent dévorés au petit déjeuner et Robin suça les cartilages de la tête, tout en faisant très attention aux dents de l'animal, coupantes comme des lames de rasoir. Sur la carcasse pratiquement sans os, je pus tailler de longs filets. Cette chair très blanche était plus ferme que celle de la dorade mais plus juteuse aussi et, avec un immense plaisir, nous mâchonnâmes les morceaux encore humides.

[…]

 



27/07/2008
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